Comment transmettre un patrimoine immobilier à ses enfants ? La création d’une SCI familiale apparaît souvent comme une solution efficace. Parce qu’elle permet à la fois de protéger son conjoint, d’échapper aux difficultés de l’indivision et de faire de l’optimisation fiscale, une société civile immobilière résout de nombreuses problématiques de transmission. Créer une SCI pour transmettre un patrimoine n’est cependant pas adapté à toutes les situations. Pour s’assurer de la pertinence de cette solution, il importe de bien en mesurer les avantages et les inconvénients.
Une société civile immobilière est une structure créée par au moins 2 associés pour gérer et faire fructifier un patrimoine immobilier. Une SCI familiale obéit aux mêmes règles de fonctionnement qu’une SCI classique. Son objet social qui doit être à caractère civil lui interdit toute activité commerciale. Une société civile immobilière ne peut donc procéder à des opérations d’achat et de revente de biens immobiliers ni exercer une activité à caractère professionnel comme la location de biens meublés.
Comme dans le cadre de n’importe quel contrat de société, la création d’une SCI familiale est subordonnée à l’accomplissement de quelques formalités :
Lorsqu’elle est soumise à l’IR, une SCI familiale ne nécessite pas la tenue d’une comptabilité. Les gérants doivent cependant accomplir chaque année un certain nombre de tâches administratives qui s’ajoutent aux contraintes de gestion des actifs immobiliers :
Les Français plébiscitent l’immobilier comme meilleur moyen de protection de leur épargne. Nombreux sont ceux qui souhaitent se constituer un patrimoine immobilier avec pour objectif de le léguer plus tard à leurs enfants. Cette stratégie patrimoniale se heurte toutefois à 2 inconvénients majeurs :
Pour contourner ces difficultés, la création d’une SCI familiale constitue un excellent outil de transmission. Lorsque des biens immobiliers sont détenus par l’intermédiaire d’une SCI, chaque associé, membre de la famille, se voit attribuer des parts sociales, ce qui permet effectivement d’éviter l’indivision.
Une société civile immobilière est également souvent présentée comme un instrument d’optimisation fiscale. Ce point mérite toutefois d’être relativisé en fonction du régime fiscal retenu par les associés et selon que la SCI soit soumise à l’impôt sur les sociétés ou à l’impôt sur le revenu. Lorsque l’option à l’IRPP a été retenue, la SCI est réputée fiscalement transparente. Cela signifie que chaque associé qui perçoit des revenus (loyers) versés par la SCI sera imposé en fonction de son taux marginal d’imposition et après prélèvements sociaux. De même, les plus-values réalisées sur les cessions de biens immobiliers détenus par la SCI seront soumises au régime de droit commun des plus-values immobilières. Les associés d’une SCI soumise à l’IR sont donc imposés de la même manière que s’ils détenaient des biens en direct.
À noter que s’il peut être opportun de gérer un patrimoine immobilier locatif au sein d’une SCI, il ne sera pas toujours judicieux d’y inclure le logement familial. En effet lorsqu’une SCI détient une résidence principale, celle-ci ne bénéficie plus de l’abattement de 30% qui peut être pratiqué lors de la détermination de l’assiette d’imposition servant de calcul à l’IFI. Par ailleurs, la détention de la résidence principale par une SCI a pour conséquence qu’en cas de décès, le conjoint survivant ne bénéficie plus du droit viager d’habitation (la possibilité de continuer d’occuper de son vivant le logement comme prévu par les articles 763 et 764 du Code civil).
Lorsque l’option à l’IS a été choisie, c’est la SCI qui s’acquitte de l’impôt. Dans ce régime les bénéfices subissent une taxation de 15 % jusqu’à 38 120 € et de 25 % (à partir de 2022) au-delà. Les plus-values de cessions sont également taxées à 15 % ou 25 %. En revanche la détermination de ces plus-values ne bénéficiera d’aucun abattement pour durée de détention comme cela est le cas dans le régime de droit commun qui s’applique aux particuliers. Les biens immobiliers détenus par une SCI à l’IS pourront cependant faire l’objet d’un amortissement comptable ce qui permettra de réduire le résultat imposable.
SCI soumise à l’IR | SCI soumise à l’IS | |
Impôt sur le revenu de la SCI (loyers) | Aucun : les impôts sont payés par les associés | 15 % jusqu’à 38 120 € de résultat et 25 % au-delà de ce seuil |
Impôts payés par les associés | Régime micro foncier avec abattement de 30 % (jusqu’à 15 000 € de revenus) ou régime réel puis imposition au barème de l’impôt sur le revenu + prélèvements sociaux (17,2 %) | Prélèvement forfaitaire unique de 30 % sur les revenus versés par la SCI |
Impôt sur les plus-values de cession | 19 % d’IR + 17,2 % de prélèvements sociaux si la vente a lieu dans les 5 premières années suivants l’achat. Au-delà, application d’un abattement qui permet d’être totalement exonéré d’impôt sur le revenu après 22 ans de détention et de prélèvements sociaux après 30 ans | Même règle d’imposition que pour les revenus en ce qui concerne l’IS acquitté par la SCI : 15 % jusqu’à 38 120 € de résultat et 25 % au-delà de ce seuil.* La part distribuée aux associés est en suite soumise au PFU de 30 %. |
*A noter que la plus-value est calculée en soustrayant du prix de cession la valeur nette comptable du bien cédé. Cette VNC correspond au prix d’achat du bien réduit du montant des amortissements pendant sa durée de détention. Exemple :
- Prix d’achat : 100 000 €
- Durée de détention : 10 ans
- Amortissement : 50 000 € (soit 5 % amorti chaque année)
- Valeur nette comptable : 50 000 € (= prix d’achat –amortissements)
- Prix de cession : 200 000 €
- Plus-value taxable : 200 000€ - 50 000€ = 150 000€ (Prix de cession - VNC)
Lorsqu’ils héritent de biens immobiliers détenus en direct par leurs parents, chaque enfant reçoit un droit de propriété sur une portion d’immeuble. Les héritiers sont ainsi soumis au régime de l’indivision. Le principal inconvénient de ce régime relève d’un principe selon lequel : « Nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué …» (Art. 815 du Code civil). N’importe quel indivisaire pourra donc contraindre les autres héritiers à la vente du bien. A contrario, lorsqu’un patrimoine immobilier est détenu par l’intermédiaire d’une SCI, un héritier ne peut vendre ses parts sans l’assentiment de tous les autres associés. Cette règle inhérente au fonctionnement d’une société civile immobilière permet de conserver l’intégrité d’un patrimoine familial.
La création d’une SCI familiale peut également aboutir à une meilleure protection du conjoint survivant. Notamment lorsque ce dernier a été nommé gérant de la SCI familiale et lorsqu’une clause d’agrément lui confère tous pouvoirs pour autoriser des cessions de parts.
Comme dans le cas d’un bien détenu en direct, les parts sociales d’une SCI peuvent faire l’objet d’une donation. Chaque parent peut ainsi céder à chaque enfant 100 000 € tous les 15 ans exempts de droits de succession. Par ailleurs, au moment de la transmission (donation ou succession), la valeur des parts sociales d’une SCI familiale pourra être minorée du montant des encours de crédit contractés par la SCI pour acquérir des actifs immobiliers. L’administration fiscale admet en outre qu’une décote de 10 % à 15 % soit appliquée à la valeur nette de ces parts. En effet des parts sociales de sociétés civiles immobilières sont réputées moins « liquides » et plus difficiles à vendre qu’un bien détenu en direct.
Loger un patrimoine immobilier au sein d’une SCI familiale à des conséquences importantes sur la transmission. Cette décision nécessite donc une réflexion approfondie sur les objectifs que l’on souhaite atteindre. Les conseillers de Pierre & Placements sont à votre disposition pour vous permettre de déterminer si la création d’une SCI familiale est une réelle opportunité pour vous.